A propos d'une journée portes ouvertes

La lecture du Thread : "Vous avez tous rêvé de renvoyer chier votre plus haut directeur?" ce matin m'a mis de bonne humeur et surtout remis en mémoire 2 évènement, un narrant la rencontre entre un technicien de surface et le PDG d'une entreprise, l'autre une anecdote au sujet de la première journée "Portes ouvertes" dans le bureau d'études jusqu'alors considéré comme tellement confidentiel que c'en était scandaleux d'imaginer y faire rentrer des gens !
Pour la date et l'illustration de ce billet, c'est facile, j'ai toujours gardé une photo distribuée aux visiteurs à cette occasion :

Photo d'un moteur sur banc d'essai remise lors de la visite en juin 90

Je vous parle donc d'une histoire datant d'un week-end de juin 1990 où pour la première fois les employés d'un site confidentiel pouvaient faire visiter leur lieux de travail à leur famille. 

Classé à la rubrique "GL" (car histoire personnelle) mais aussi à celle de "management" car les pratiques identifiables dans ce billet étaient à l'époque innovantes en termes de management : passer outre les habitudes pour trouver des sources de motivation à ses collaborateurs. 
Quelle meilleure idée que de permettre à tout un chacun de parler à ses proches de son métier et ce à son poste de travail ? 

C'était dans la suite logique de ce manager hors classe qui avait déjà, en rentrant des USA où il avait passé une partie de sa carrière, institué pour faire connaissance avec ses collaborateurs des repas de midi ou des petits déjeuners où ils pouvaient échanger librement. 
Consacrer du temps à comprendre ses troupes dans des situations non contraintes, ça a du sens. 

Revenons à cette fameuse journée portes ouvertes : c'était une première d'un longue série qui aura toutefois corrigé par la suite le petit dysfonctionnement que je me propose de vous narrer. 

Mon épouse m'accompagne pour enfin découvrir l'endroit où je passe le plus clair de mon temps, il faut avouer qu'après la lecture de l'épisode de la soutenance de mon mémoire vous vous doutez que c'était largement plus que l'horaire légal... mais ça ne m'a pas empêché d'être présent auprès des miens à chaque fois qu'il a fallu. 

Bon, direction mon labo qui n'était pas ouvert à la visite mais chaque collaborateur avait une dérogation pour aller dans les lieux privés avec exclusivement ses proches et ce de façon contrôlée. 

Petit soucis de vessie, madame cherche les toilettes, je l'accompagne donc à la première porte.... fermée !!!

Connaissant la maison, je vérifie la suivante, même constat, les toilettes sont fermées à clé, et je ne dispose pas d'un passe ad hoc. La tension commence à monter d'un cran, il y a de l'eau dans le gaz.

Mobilisé pour assurer un tour de permanence le lendemain, je sais que dans les étages il est prévu une démonstration de CAO et puisque l'étage en question est de ce fait ouvert, il est impossible d'avoir fermé les toilettes qui s'y trouvent. 

Donc nous voila montant au 3ème, je passe outre le ruban rouge et blanc canalisant le parcours des visiteurs et accompagne madame aux toilettes. 

En ressortant et en redescendant pour poursuivre la visite ou alors rentrer à la maison, compte tenu de la tournure des évènements on peut s'imaginer que ça aurait pu finir ainsi, début d'explication oiseuse, c'est quoi cette organisation de... no comment.
Simultanément, le patron des études est en train de monter le même escaliers avec toute la troupe de VIPs auxquels il commente la visite. 
Bel orateur, sympa de l'avoir comme guide, j'aurais bien aimé. 

Bref, escalier pas assez large, avant de me placer sur le côté pour laisser le passage à ce groupe impressionnant, je dis à mon épouse tu n'a qu'à lui demander, voilà l'organisateur. 
Silence de mon épouse reconnaissant le personnage. 

Arrivé à mon niveau, le patron s'arrête, donc tout le monde est obligé de s'arrêter au milieu de l'escalier pour ne pas dépasser le guide.
Il me serre la main en disant "Bonjour Monsieur CHATEL". 
Je lui retourne le bonjour en faisant les présentations : "mon épouse, Patricia CHATEL, Monsieur Philippe VENTRE". 
En le saluant, elle ajoute l'avoir reconnu : "je vous ai vu à la télé ! "
Grand sourire du patron qui reprend son ascension suivi du groupe qui doit encore se demander qui donc étaient ces personnes rencontrées ?

Comme qui dirait la tension avait brutalement disparu, allez savoir pourquoi...

La suite de la visite s'est donc déroulée normalement, et je n'ai manifestement pas été le seul à rencontrer le soucis avec les toilettes fermées, pour les sessions suivantes sur les autres sites, des toilettes mobiles (Algéco de mémoire) avaient été déployées. 

En conclusion de ce long billet, quelques précisions. J'avais croisé ce brillant personnage a maintes reprises :
  • la première c'est à son retour des USA quand il a pris ses premières fonctions et faisait son tour du BE avec le chef de services qui avait bloqué mon départ pour un autre où j'aurais pu faire mon mémoire. 
    Guerre des chefs, j'étais indispensable donc avais perdu l'opportunité de finaliser mon parcours CNAM. 
    Le nouveau patron avait donc ce dossier dans l'historique, arrivé à ma planche il connaissait déjà mon nom et découvrant le travail sur lequel je bossais, a été surpris et demandé si c'était ça qui me rendait indispensable. Réponse confuse du chef de service : peu de temps après j'avais enfin un nouveau boulot pour finaliser mon parcours. 
  • Patron proche de ses collaborateurs, quand il organisait des conventions il limitait le coefficient au niveau le plus bas compatible avec la taille de la salle trouvée, mais arrivait quand même à inviter des techniciens en haut de la classification ETAM. Quand le futur PDG a réussi à l'écarter de la direction de l'ingénierie en le faisant nommer à un poste honorifique à l'extérieur de l'entreprise, les bonnes habitudes sont revenues et j'ai dû attendre de gravir les échelons pour enfin pouvoir recommencer à avoir une information en direct. Beaucoup devraient se rappeler que l'histoire transmise de bouche à oreille finit toujours par perdre son sens initial, même si des éléments de langage sont mis à disposition. 
    Deux PDG successifs ont appliqué cette idée de réunir tous les cadres de l'entreprise, le premier c'était à la Villette... un samedi 16 avril ! Le second c'était l'appel de Bercy en one man show du PDG pour secouer l'encadrement par rapport aux dérives qualité. 
    Certains pourraient dire que le suivant réservait ses prestations lors de fastueux dîners, mais ce serait méchant...
photo de Philippe VENTRE
En résumé je suis content d'avoir croisé Philippe VENTRE, ce brillant ingénieur de l'ESTACA qui, quand il a été embauché, n'avait pas le titre d'ingénieur, le diplôme n'ayant été reconnu que plus tard, mais qui a réussi à gravir presque tous les échelons de l'entreprise. 

Un grand expert de la sécurité passive mais avant tout de management (son Bac Philo y étant peut-être pour quelque chose).

Louis CHATEL le 20/04/2020

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