Peut-on cacher la vérité ?
Dans son livre It Worked for Me: In Life and Leadership, Colin Powell aborde un sujet de la plus haute importance en termes de management : de l'importance de faire remonter le plus vite possible les informations importantes, sensibles, à la plus haute hiérarchie et ce afin qu'elle ne soit pas mise en difficulté en l'apprenant par l'extérieur.
A propos de Colin Powell
Certains pourront m'objecter que ce personnage est celui qui a menti au monde entier en justifiant l'invasion de l'Irak par la présence d'armes de destruction massive, donc n'iront pas plus loin dans la lecture de ce billet.
J'en suis conscient et j'assume, mais personnellement j'évite de confondre message et messager. En France nous avions la chance d'avoir un Dominique de Villepin comme messager mais il me semble que même s'il est l'auteur de la prose :
"Et c'est un vieux pays, la France, d'un vieux continent comme le mien, l'Europe, qui vous le dit aujourd'hui, qui a connu les guerres, l'occupation, la barbarie"
il n'empêche que la décision de ne pas participait au conflit appartenait à Chirac. L'histoire retiendra que nous avions pris la bonne décision alors que de son côté Colin Powell devra assumer le mensonge :
C’est une tache parce que je suis celui qui a fait cette présentation au nom des Etats-Unis devant le monde, et cela fera toujours partie de mon bilan.
Une chose est certaine, récemment il vient de nouveau de se faire remarquer avec sa prise de position de ne pas soutenir D. Trump et d'appeler à voter J. Biden pour la prochaine présidentielle US.
Comme quoi il y a bien des limites à la loyauté à son parti... pour le reste était-il vraiment au courant que les armes n'existaient pas ? C'est un autre sujet que je n'aborderai pas.
It Worked for Me: In Life and Leadership
Un collègue a partagé il y a quelques années un article parlant de ce livre lors de sa sortie.
C'était il y a bien longtemps, près de 10 ans, mais les développements récents suite à la pandémie et en particulier le sujet relatif aux masques m'a fait rechercher les exemples de ce livre qui m'avaient conforté dans mon mode de gestion de l'information : ne pas chercher à plaire mais informer dès que possible les personnes concernées.
Il faut avouer que la flatterie paye plus avec certains pseudo managers, un carrière peut souffrir d'une franchise exacerbée, mais quand on se regarde dans la glace il faut savoir avoir la conscience tranquille...
Nota : le sujet a déjà été évoqué dans le billet à propos de performance...
Petite anecdote au sujet des éclats de voix
Pour commencer une description qui résume bien les postures :
Il y a des années, l'un de mes meilleurs amis, le général de division Butch Saint, a été expulsé du bureau du chef d'état-major de l'armée pour avoir donné de mauvaises nouvelles au sujet de l'un des programmes préférés du chef. Butch savait avant d'entrer, qu'il entrait dans la fosse aux lions, et il n'a pas été surpris quand il a été expulsé. La nouvelle s'est rapidement répandue dans le Pentagone, comme elle le fait toujours lorsque de telles choses se produisent. Peu de temps après en avoir entendu parler, je suis tombé sur Butch dans un couloir. Tout en marchant, je lui ai offert des mots réconfortants. "Hé," dit-il doucement, "il ne me paie pas pour lui parler joyeusement."
Je n'ai jamais oublié ça. Butch a pris sa retraite en tant que général quatre étoiles.
Comme quoi certains ont le sens du devoir et d'autres savent le récompenser.
Personnellement il m'est arrivé de défendre une théorie malgré la mauvaise humeur de mon responsable de l'époque qui l'a contestée avec violence, la porte ouverte de son bureau ayant convaincu l'ensemble de l'étage que je m'étais pris une avoinée, ce que la rumeur n'a pas manqué de propager !
Le soucis c'est qu'il s'agissait d'une démonstration, alors de façon similaire à une question du professeur Cazin, j'avais vérifié de quoi il était question... et étais sûr de mon fait.
Trente minutes plus tard (le temps de réfléchir à mes arguments), en allant à la cantine et en sortant une gitane de son paquet (à l'époque on fumait encore dans les bureaux), tout en passant à côté de mon bureau j'ai entendu un petit tu avais raison... ça valait pour excuses mais là personne n'a entendu.
Une chose est certaine, il m'a toujours fait confiance et a su me confier des responsabilités.
Comme quoi les éclats sont rarement un signe définitif alors que beaucoup en tirent des conclusions.
Personnellement il m'est arrivé de défendre une théorie malgré la mauvaise humeur de mon responsable de l'époque qui l'a contestée avec violence, la porte ouverte de son bureau ayant convaincu l'ensemble de l'étage que je m'étais pris une avoinée, ce que la rumeur n'a pas manqué de propager !
Le soucis c'est qu'il s'agissait d'une démonstration, alors de façon similaire à une question du professeur Cazin, j'avais vérifié de quoi il était question... et étais sûr de mon fait.
Trente minutes plus tard (le temps de réfléchir à mes arguments), en allant à la cantine et en sortant une gitane de son paquet (à l'époque on fumait encore dans les bureaux), tout en passant à côté de mon bureau j'ai entendu un petit tu avais raison... ça valait pour excuses mais là personne n'a entendu.
Une chose est certaine, il m'a toujours fait confiance et a su me confier des responsabilités.
Comme quoi les éclats sont rarement un signe définitif alors que beaucoup en tirent des conclusions.
Que faire face à un évènement tragique ?
Encore une anecdote mettant en relation un vieux sergent grisonnant et un tout nouveau sous-lieutenant supervisant son premier exercice de zone de largage...
... Les avions de tête largueront de l'artillerie, des camions et des munitions. Tout va bien et le lieutenant donne le OK. La première goulotte sort et se déploie complètement. Le second est un streamer et ne se déploie pas. Il frappe le premier, qui s'effondre. Les chutes suivantes sont prises dans le désordre et elles commencent toutes à toucher le sol à pleine vitesse. Des débris volent partout, des incendies d'essence éclatent, touchent les munitions et déclenchent un feu de broussailles qui se propage rapidement dans les bois environnants.
Le jeune lieutenant se tient là en contemplant la catastrophe.
Il dit finalement au sergent: "Umm, Sarge, pensez-vous que nous devrions appeler quelqu'un?"
Sa réponse patiente: "Eh bien, Lieutenant, je ne sais pas à juste titre comment vous allez garder le secret."
La conclusion de Colin Powell :
Les états-majors essaient comme le diable de retarder le plus longtemps possible la transmission de mauvaises nouvelles au patron. Cela convient à certains patrons, mais cela ne me convenait jamais. J'avais une règle pour mes états-majors: "Faites-moi part d'un problème dès que vous en serez informé. "Tout le monde connaît le vieil adage: les mauvaises nouvelles, contrairement au vin, ne s'améliorent pas avec le temps".
A propos d'ABU GHRAIB
En 2003, des soldats et des interrogateurs américains en charge des prisonniers irakiens à la prison d'Abou Ghraib à Bagdad ont soumis les prisonniers à de terribles abus, tortures et humiliations. Leurs actions étaient choquantes et clairement illégales.
Vers la fin de l'année, l'un des soldats stationnés à la prison a signalé les abus à ses supérieurs et a déclaré que des photos avaient été prises par les agresseurs. Les commandants en Irak ont immédiatement pris des mesures et pris des mesures pour lancer une enquête. Peu de temps après, la nouvelle est parvenue au secrétaire Rumsfeld et au général Richard Myers, président des chefs d'état-major interarmées, qui ont informé le président début janvier 2004 que des incidents à Abou Ghraib étaient examinés. Il semble que personne n'ait dit à ces hauts dirigeants que ces incidents étaient vraiment horribles. Le général Ricardo Sanchez, le commandant militaire en Irak, a annoncé l’enquête le 12 janvier. Les soldats ont été suspendus de leurs fonctions pendant une mesure disciplinaire en attente. La machine fonctionnait, mais pas tout.
Les tuyaux menant au haut dirigeant n'ont jamais été allumés. Les photos d'Abou Ghraib étaient à la disposition des hauts dirigeants du Pentagone, mais il ne semble pas que le secrétaire Rumsfeld les ait vues, ni montrées à la Maison Blanche. Un fusible était en train de brûler, mais personne n'a informé la haute direction qu'une bombe allait exploser.
Fin avril, les 60 minutes de CBS ont ouvert grand la porte à l'histoire. Ils avaient obtenu les photos et les avaient montrées en ondes. La bombe a explosé et l'enfer s'est déchaîné. J'ai été choqué en voyant les photos.
Comment les soldats américains ont-ils pu faire cela? Comment les implications de leur publication éventuelle ne pourraient-elles pas déclencher l'alarme au Pentagone et à la Maison Blanche? Pourquoi n'y a-t-il pas eu d'action au sommet? Don Rumsfeld existait depuis longtemps. S'ils avaient su ce qui se passait, lui et son personnel auraient immédiatement compris les dimensions de la crise. Tout comme le personnel du président. Et pourtant, près de quatre mois se sont écoulés et personne n'a élevé le dossier en amont auprès du secrétaire ou du président. Si cela s'était produit, le problème n'aurait pas été résolu comme par magie, mais les personnes au sommet auraient eu le temps de décider comment faire face à la catastrophe et aller au fond des choses. Le président n'a pas été prévenu tôt. Les dirigeants devraient former leur personnel que chaque fois que la question atteint la surface de leur esprit
-"Umm, vous pensez que nous devrions appeler quelqu'un?"
- les réponses sont presque toujours, "Oui, et il y a cinq minutes."
Et c'est une assez bonne règle pour la vie, si vous n'avez pas encore mis le feu à vos bois. Avec une notification rapide, nous pouvons tous nous regrouper sur le problème de nos différentes perspectives et ne pas perdre de temps. Comme je l'ai dit à mon personnel à plusieurs reprises au fil des ans, si vous voulez travailler pour moi, ne me surprenez pas. Et quand tu me dis, dis-moi tout.
Tiré du livre It Worked for Me: In Life and Leadership de Colin Powell, (traduction avec Google Traduction).
© 2012 par Colin Powell.
Conclusion
Dans la vie de tous les jours, certaines situations peuvent échapper aux décideurs, mais peuvent-ils ne pas la faire remonter à leur hiérarchie ?
Là je vais oser généraliser la pyramide en remettant en haut le citoyen qui a élu les décideurs (situation similaire en gestion d'entreprise vis à vis des actionnaires).
"Umm, vous pensez que nous devrions prévenir le public ?"
Dans tous les cas les médias vont s'en charger, l'exemple des différentes affaires depuis le début du quinquennat montre qu'il ne sert à rien de vouloir cacher la poussière sous le tapis car comme pour l'affaire du largage foiré, le tapis n'arrivera jamais à couvrir l'évènement.
Et si chaque décideur choisit de jouer la transparence, même si ça ne fait pas plaisir, identifier le problème et ne pas le masquer permettra de mettre en place un plan d'actions pour éviter que ça se reproduise plutôt que de déployer des actions pour essayer de masquer le problème.
Et essayer de masquer le problème quand il s'agit de masques, c'est un peu cocasse me semble-t-il.
Enfin, n'oublions pas l'expérience de Asch et sachons faire confiance à notre jugement et à nos convictions.
Et essayer de masquer le problème quand il s'agit de masques, c'est un peu cocasse me semble-t-il.
Enfin, n'oublions pas l'expérience de Asch et sachons faire confiance à notre jugement et à nos convictions.
Billet mis à jour par Louis CHATEL le 16/09/2023
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